Est-ce que je crois encore à la protection de Oishi ? Je ne suis plus la petite chérie du boss et les années se sont écoulées depuis ma dernière rencontre avec l’asiatique. Je ne l’ai pas oublié, mais un autre asiatique obsède mes pensées, Monsieur Osoto. Je suis triste pour lui. Personne ne devrait se faire plaquer comme il l’a été… comme je l’ai été. Cela nous fait un point commun, triste, mais qui nous uni en quelque sorte. Est-ce que je suis trop fleur bleue ? Est-ce que j’ai le syndrome du sauveur ? Je voulais aider MatVei. Je voulais le rendre heureux ou au moins qu’il sache qu’il le pouvait. Je n’ai pas dû essayer assez fort. Si seulement je savais où le retrouver… Mais trois ans... On dit loin des yeux, loin du coeur. C’est faux, je l’ai toujours aimé, mais j’ai réalisé que je ne suis pas à la hauteur. Peut-être que quand je le serai, je le retrouverai et peut-être qu’on reprendra tout depuis le début. Parfois j’en rêve, et souvent je me dis que je ne suis qu’une idiote et qu’il m’a oublié depuis longtemps. Pourtant, son regard lorsqu’il m’a demandé si je pensais pouvoir être la première et ce que j’ai ressenti à ce moment là, je ne l’oublierai jamais. Je ne me suis jamais senti plus vivante qu’en sa compagnie. Je ne peux pas lui enlever ça.
Je me suis rendu dans le quartier chinois. C’est peut-être maladroit de penser qu’un peu de nourriture asiatique pourra réconforter monsieur Osoto, mais c’est tout moi. Peut-être qu’il préfère la nourriture française, qu’est-ce que j’en sais ? Ce n’est pas comme si nous nous connaissions ou qu’un profil wikipédia lui avait été consacré. J'ai regardé... juste au cas où.
Après avoir tourné pendant dix minutes autour du restaurant qui m’intéresse, je finis par trouver une place dans une ruelle. Las Vegas ne m’a jamais fait peur, que ce soit de jour comme de nuit. Je n’ai jamais eu aucune mésaventure grave disons. Je crois qu’à trop avoir peur, on attire les ennuis. Et puis, pourquoi me soucier des étrangers alors que mes proches se sont toujours montrés plus dangereux. Sariel m’a effacé la mémoire pour tout ce qui le concerne, mais je n’ai pas oublié Eric, sa sœur, ou encore Joy. Alors, non, je ne vis pas la peur au ventre dès que je me trouve seule dans un lieu isolé.
Je fais les centaines de mètres qui me séparent du restaurant. J’y récupère ma commande et en ressors le sourire au lèvres, fière de moi. Je porte un sac chaud et fumant d’une main, et une bouteille d’alcool de l’autre. L’odeur de nourriture me donne envie d’arriver plus vite jusque chez monsieur Osoto. J’ai une faim de loup. Le pas est plus pressant lorsque j’arrive à la voiture et je fais sans doute moins attention, car je ne le vois pas arriver. Je n’ai pas le temps d’ouvrir la portière, qu’un corps vient me plaquer contre la carrosserie. Sous la surprise, je laisse tomber ce que j’ai dans les mains, et la bouteille vient se briser à mes pieds. Jamais je n’aurai eu peur avant. Je me savais protégée par les Nephilim en permanence – du moins, c’est ce que je croyais. Mais cette nuit, la peur me tord le ventre alors que sa main se pose sur ma gorge. Je ne vois pas de qui il s’agit, ni même à quoi il ressemble et alors que je suis si pipelette habituellement, aucun son ne sort de mes lèvres. J’espère au plus profond de moi qu’il ne veut que mon sac.
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